Mark Peploe

Mark Peploe naît le 3 mars 1943 à Nairobi, au Kenya, dans une famille britannique installée temporairement en Afrique de l’Est. Très tôt, il baigne dans une atmosphère cosmopolite, avant que la famille ne retourne en Angleterre. Son enfance et son adolescence sont marquées par une éducation rigoureuse et un intérêt croissant pour la littérature, la peinture et le cinéma. Après des études en Angleterre, Mark Peploe s’installe en Italie, un pays qui exercera une influence décisive sur son parcours. Il étudie l’histoire de l’Art à l’Université de Pérouse capitale de l’Ombrie, puis complète sa formation à la London Film School. Cette double formation, intellectuelle et artistique, forge un esprit analytique et sensible, qualités qui transparaîtront dans ses scénarios et ses réalisations futures.

Au début des années 1970, Mark Peploe débute dans le monde du cinéma en collaborant à plusieurs projets. Son premier coup d’éclat survient en 1973 lorsqu’il coécrit «Profession: reporter» avec le célèbre réalisateur italien Michelangelo Antonioni. Le film, tourné en grande partie en Espagne et en Afrique du Nord, met en scène Jack Nicholson dans un rôle énigmatique et pose les bases du style Peploe: atmosphère épurée, questionnements identitaires, et goût du silence. Ce film majeur assoit la réputation de Peploe comme scénariste habile et réfléchi, capable de traduire en images les subtilités de l’âme humaine. En 1984, il s’essaie à la réalisation avec le court-métrage «Samson and Delilah».

Les années 1980 marquent un tournant dans sa carrière. Mark Peploe coécrit, avec son épouse Clare Peploe et le réalisateur Bernardo Bertolucci, le scénario du film «Le dernier empereur» (1987), fresque monumentale retraçant la vie du dernier empereur de Chine. Le film remporte neuf Oscars, dont celui du meilleur scénario adapté, pour Mark Peploe. Cette reconnaissance internationale le place parmi les scénaristes les plus talentueux de sa génération. Fort de ce succès, il passe derrière la caméra. En 1990, il réalise «Double vue», un thriller psychologique fascinant centré sur un jeune garçon aveugle confronté à une série de meurtres. Le film est acclamé pour sa construction narrative non linéaire et sa manière subtile de suggérer la folie et la peur. Cette œuvre, qui reste son principal travail en tant que réalisateur, confirme son habileté à manier l’angoisse et les distorsions de la perception.

Discret mais toujours actif, Mark Peploe continue à collaborer à divers projets de scénarios au fil des décennies, privilégiant la qualité à la quantité. Il participe à l’élaboration de scénarios exigeants et contribue à deux autres films signés Bernardo Bertolucci: «Un thé au Sahara» (1990), adaptation du roman de Paul Bowles, interprété par Debra Winger et John Malkovich, et «Little Buddha» (1993) avec Keanu Reeves dans le rôle de Siddhartha. Son style, reconnaissable à son minimalisme élégant, son intérêt pour les figures marginales et sa fascination pour l’ambiguïté psychologique, traverse l’ensemble de son œuvre. Une longue maladie emporte Mark Peploe le 8 juin 2025, à Florence en Italie. Il reste une figure singulière du cinéma européen, à la croisée des cultures anglaise et italienne. Il incarne cette génération d’auteurs pour qui le cinéma est un lieu d’exploration intérieure, de poésie visuelle et de réflexion profonde. Sa filmographie, bien que peu abondante, témoigne d’une exigence rare et d’un engagement artistique constant.

© Philippe PELLETIER