Wu Ma

Né le 22 septembre 1942 à Tianjin, en Chine, sous le nom de Feng Hongyuan (馮宏源), Wu Ma est devenu l’un des visages les plus familiers du cinéma de Hong Kong durant la seconde moitié du XXe siècle. Son parcours est celui d’un acteur et réalisateur prolifique, dont la carrière a traversé les époques, les genres et les transformations de l’industrie cinématographique chinoise. En 1960, à l’âge de 18 ans, Wu Ma quitte la Chine continentale pour Hong Kong, dans un contexte politique et social tendu. Il intègre l’école d’Art dramatique des studios Shaw Brothers en 1962, où il se forme aux Arts martiaux, au théâtre classique chinois, et à la mise en scène. Rapidement, il se distingue par sa polyvalence, sa discipline et sa capacité à endosser des rôles aussi bien comiques que dramatiques.

Sa carrière d’acteur débute véritablement en 1964 avec le film «La Générale Mullan», mais c’est dans les années 1970 qu’il commence à s’imposer comme un acteur de second rôle incontournable, notamment dans des films de sabre et d’action. Sa collaboration avec les Shaw Brothers lui permet de participer à plus d’une centaine de films, développant une filmographie dense et variée. C’est en 1970 qu’il réalise son premier film, «Miss Judoka règle ses comptes au karaté», marquant le début de sa double carrière d’acteur-réalisateur. Dans les années qui suivent, Wu Ma alterne entre les deux casquettes, souvent avec succès. Il s’associe à des réalisateurs influents de la nouvelle vague hongkongaise, notamment Tsui Hark et Sammo Hung. Au début des années 1980, Wu Ma atteint une renommée internationale grâce à sa collaboration avec Tsui Hark sur le film «La fureur du revenant» (1982), qui mêle fantasy, action et effets spéciaux novateurs pour l’époque. Ce rôle charismatique contribue à élargir son public au-delà des frontières de l’Asie.

Mais c’est sans doute son rôle de moine taoïste excentrique dans «Mr. Vampire» (1985), produit par Sammo Hung, qui le rend véritablement culte. Ce film emblématique du genre «jiangshi» (films de vampires chinois) propulse Wu Ma dans le cœur des spectateurs comme un acteur au registre comique et mystique tout à la fois. Ce rôle, qu’il décline sous différentes variantes dans plusieurs suites et dérivés, devient sa signature. Tout au long des années 1980 et 1990, Wu Ma enchaîne les apparitions dans des films majeurs du cinéma de Hong Kong: «Histoires de fantômes chinois» (1987) de Siu-Tung Ching avec Leslie Cheung, «Swordsman» (1989) auprès de Jacky Cheung et Cecilia Yip, «Il était une fois en Chine» (1991) de Hark Tsui, où il donne la réplique à Jet Li. Toujours dans des rôles de soutien, il incarne des figures de sagesse, d’autorité ou de folie douce, donnant une humanité singulière à chaque personnage.

Le 4 février 2014, Wu Ma s’éteint à Hong Kong des suites d’un cancer du poumon, à l’âge de 71 ans. Sa disparition marque la fin d’une époque pour le cinéma hongkongais, tant il en avait été une figure constante et familière pendant près de cinquante ans. Wu Ma laisse derrière lui une œuvre immense, plus de 300 films comme acteur, une quarantaine comme réalisateur, et un héritage indélébile dans la mémoire des amateurs de cinéma asiatique. Plus qu’un simple acteur, il fut un artisan du cinéma populaire, un passeur de genres, et un visage éternel du grand écran chinois.

© Philippe PELLETIER